La maîtrise de l’eau
La nécessité de gérer l’eau pour répondre aux besoins des pays et des populations constitue un enjeu de taille, et de plus en plus important, dans maintes régions du monde. D’après les données de l’OCDE, à l’horizon 2050, 3,9 milliards de personnes, soit plus de 40% de la population mondiale, vivront sans doute dans des bassins hydrographiques soumis à un stress hydrique élevé. Les projections indiquent une progression de la demande d’eau de 55% entre 2000 et 2050. Selon l’OCDE, l’augmentation de la demande en eau viendra principalement des activités manufacturières (+400%), de la production d’électricité (+140%) et des usages domestiques (+130%). Compte tenu de la concurrence entre ces demandes, il ne sera guère possible d’accroître les volumes destinés à l’irrigation, rapporte l’OCDE. L’agriculture africaine, en particulier dans l’espace du CILSS, est essentiellement pluviale avec une grande itinérance des champs et une grande mobilité du cheptel conduit de manière extensive pour la recherche des ressources y compris l’eau d’abreuvement Cette agriculture pluviale déjà vulnérable est affectée par les effets pervers du changement climatique, donnant ainsi lieu à des niveaux de rendements bas et volatiles. En raison de la stagnation des productions nationales et de l’augmentation des besoins
de consommation consécutive à l’accroissement démographique, les États sahéliens et d’Afrique de l’Ouest s’obligent à résorber leurs déficits en important des quantités de plus en plus importantes de denrées alimentaires. L’accroissement et la mutation de la concurrence (l’agriculture, la pêche, le secteur de l’énergie, l’industrie, les quartiers résidentiels, etc.) influent sur la sécurité alimentaire et la nutrition de trois manières principales :
i) La disponibilité/pénurie (la quantité moyenne d’eau disponible) ;
ii) L’intensité de la concurrence entre les acteurs et les utilisations ;
iii) Les modalités de cette concurrence, 2.4. Population, genre et développement qui influent sur l’accès des populations à l’eau (OCDE, 2015 : 45)
La répartition inéquitable des ressources en eau entre les personnes et, plus particulièrement, le manque de prise en compte des populations marginalisées et vulnérables et des femmes sont également source d’insécurité alimentaire. L’Afrique est le continent des paradoxes en matière d’eau. Certains pays bénéficient d’abondantes pluies à des périodes données, mais font face, à d’autres périodes, à des pénuries d’eau pour l’agriculture. Les sécheresses et les inondations se suivent ou s’alternent dans certaines sous-régions (Bazié, 2014). L’agriculture est considérée
comme l’un des secteurs les plus touchés par les effets du changement climatique. L’exacerbation des tensions entre les acteurs est présentée comme une conséquence de la raréfaction des ressources en eau. En Afrique de l’Ouest, la baisse du niveau de la pluviométrie (surtout au Sahel), la dégradation de l’environnement et l’accroissement de la population ont provoqué un amenuisement des ressources en eau (Baron et Bonassier, 2011). Le changement climatique y entraîne des phénomènes extrêmes telles que les inondations et les longues sécheresses.
À l’horizon 2080, la FAO prédit entre 30 et 60 millions d’hectares de terre en Afrique subsaharienne qui pourraient devenir impropres à l’agriculture pluviale, à cause des aléas climatiques et des contraintes liées au sol et au terrain (Science et développement, 2017). 4 OCDE, 2015, L’eau, enjeu pour la sécurité alimentaire mondiale, Juillet 2015 (https://www.fao.org/fileadmin/user_upload/
hlpe/hlpe_documents/HLPE_Reports/HLPE-Report-9_FR.pdf, consulté le 11 mars 2022) 5 Initiative spéciale des Chefs d’État du CILSS pour accroître l’investissement dans l’eau au Sahel et en Afrique de l’Ouest et combattre ainsi la famine et la pauvreté. Avec l’acceptation par la BAD en 2012 d’en être le Chef de file, elle sert de cadre fédérateur sur l’eau au Sahel et en Afrique de l’Ouest. L’élaboration du document de projet pour l’opérationnalisation de la Coalition a été assurée par une mission conjointe BAD/CILSS (http://pariis.cilss.int/coalition-mondiale/).
Pour parer à ces défis, les experts du continent recommandent l’implantation de systèmes économes en eau, comme le système goutte-à-goutte, la micro-irrigation, la construction de barrages ou de points de retenues d’eau. Selon la Coalition mondiale sur l’eau au Sahel5, la ressource « eau » est en théorie relativement abondante en Afrique de l’Ouest, sa rareté est une rareté structurellement induite et reflète plutôt un problème dans la capacité de la région à valoriser son potentiel hydrique au service de son développement (Ouédraogo, 2013). Pour mobiliser les compétences, le savoir-faire et les ressources financières pour faire de la maîtrise de l’eau une priorité stratégique dans la sous-région, la Coalition propose une approche participative et intégrée ainsi que l’augmentation des investissements en la matière. Les options et impératifs d’action pour la maîtrise de l’eau préconisés par l’OCDE dans le domaine de la maîtrise d’eau consistent à
- :i) Inciter à un usage efficient de l’eau
- ;ii) Améliorer la qualité de l’eau ;
- iii) Investir dans des infrastructures vertes ;
- iv) Accélérer le déploiement des infrastructures d’approvisionnement en eau et d’assainissement dans les
pays en développement en mettant à l’étude des solutions novatrices, nécessitant moins d’eau, d’énergie ou de capitaux.